Dorothée Gilbert : Interview 

« Je viens d'une famille qui ne connaît rien à la danse. Au départ, c'était simplement un hobbie de petite fille. Ma mère faisait du piano, j'aimais gigoter à côté d'elle. Nous habitions à Toulouse. Mes parents m'ont inscrite au Conservatoire car il avait la réputation d'avoir de bons profs. Et puis à dix ans, j'ai assisté à une représentation de Giselle au théâtre du Capitole, avec Manuel Legris. J'ai adoré les costumes, l'histoire, les personnages, ça a été le déclic : j'ai compris qu'on pouvait faire de la danse son métier. J'ai dit à ma mère que c'était ça que je voulais faire. » Ses parents réagissent bien, mais font d'emblée preuve d'exigence. « Ils m'ont dit: 'Quoi que tu choisisses de faire, il faudra le faire au top pour le plaisir du travail bien fait'. Puis ils se sont renseignés et ont estimé que l'Opéra de Paris était la seule compagnie valable car les danseurs y sont en contrat à durée indéterminée, alors qu'ailleurs ils sont intermittents. »

« Je n'ai jamais douté »
A 11 ans, elle se présente à l'école de danse de l'Opéra de Paris. Elle n'est pas retenue. Au lieu de se décourager, elle met les bouchées doubles: cours particuliers, horaires aménagés. « Je suis d'une nature optimiste, comme mon père. Je n'ai jamais douté. J'ai toujours pensé qu'avec le travail je pouvais y arriver. Je n'ai jamais été sûre que je serais danseuse étoile, mais je n'ai jamais pensé que c'était impossible. » Pourtant, le parcours est semé d'embûches. « Un jour, mon professeur a dit à mes parents: 'Votre fille aurait pu être danseuse, mais il y a 100 ans'. Pour lui, je n'avais pas les qualités qui permettaient d'être danseuse maintenant. Mon coup de pied (cambrure) n'était pas assez beau, mon corps était trop raide. »

« J'ai compris qu'on pouvait faire de la danse son métier. J'ai dit à ma mère que c'était ça que je voulais faire. »

Peu avant ses 17 ans survient l'étape la plus importante dans la vie d'une danseuse française: le concours d'entrée pour le corps de ballet de l'Opéra de Paris. « C'est le moment où l'on passe du statut d'élève au statut de professionnelle. C'est soit le plus beau jour de sa vie, soit le pire. » Pour Dorothée, ce sera un très beau jour, bien plus crucial que celui qui la consacre danseuse étoile, un soir de novembre 2007, à seulement 24 ans. « Danseuse étoile, ça ne change pas la vie », constate-t-elle en jouant avec ses pieds, ces derniers ne tenant guère en place plus de quelques minutes. « Bien sûr ça ouvre des possibilités, ça me donne accès à des rôles qui me permettent de m'exprimer et de progresser, mais ça ne change rien à ma manière de danser. Je vais toujours aux cours le matin et je ne me trouve pas plus parfaite. C'est plus pour l'entourage que c'est important. Ca montre qu'ils ont eu raison de croire en moi. »

Interview par Géraldine Dormoy, pour l'Express Style, le 16 février 2014

"La danse est l'art de tout dire avec des gestes." Anonyme
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